
Et la marmotte, elle…
Ah, ce bel espoir que le seul temps qui passe puisse arranger la plupart des problèmes que nous rencontrons avec Toutou.
Si c’était vrai, le métier d’éducateur canin n’existerait pas 🙂

En fonction d’un tas de choses (génétique, environnement, expérience ect), des problèmes de comportement peuvent apparaître chez le chiot, notamment à l’adolescence (6-8 mois).
Il aboie sur ses congénères, tire en laisse, a peur des voitures, ne revient plus au rappel, saute sur les passants…
Alors tant que le chiot est petit, mignon et certainement pas encore assez lourd pour que ces comportements soient vraiment gênants au quotidien, beaucoup auront tendance à attendre.
On serait tenté de se dire : C’est un ado, il est jeune, ça passera à l’âge adulte.
Et c’est alors qu’on se tire une bien belle balle dans le pied.

La plupart des problèmes qui apparaissent à l’adolescence persistent à l’âge adulte.
Après la période de socialisation (de 3 semaines à 3-4 mois), l’adolescence est la deuxième période “charnière” du développement du chien. Avec les poussées d’hormones, il a généralement plus de difficultés à communiquer et à gérer ses émotions, des peurs soudaines apparaissent, les mauvaises expériences sont plus marquantes.
C’est d’ailleurs souvent vers cet âge que j’ai le plus d’appels pour travailler un chiot devenu réactif “sans raison”. En vérité, il y a des tas de choses qui auraient pu être mises en place pour que cela n’arrive jamais ou dans une moindre mesure.
Ces problèmes n’ont aucune raison de partir d’eux-mêmes. Un chien réactif le restera s’il n’est pas pris en charge. Un traumatisme ne se guérit pas par miracle.

Sans prise en charge, il y a de bonnes chances que le problème s’aggrave.
Un chien laissé dans son stress, sa peur ou son agressivité risque d’y plonger encore plus.
Par exemple, un chien qui aurait peur des chiens trop exubérants (grands, vifs ect) risque de généraliser cette peur à l’ensemble de son espèce.
Un chien qui essaierait d’attraper les camions qui passent à proximité pourrait généraliser ce comportement à l’ensemble des véhicules, voire au mouvement en général (coureurs, vélos ect).
Bref, l’absence de travail nous expose au risque de la généralisation du comportement à d’autres situations, d’autres déclencheurs.

De plus, le chien peut s’auto-renforcer dans son comportement.
Si Toutou aboie sur les passants pour les faire fuir, ayant appris que les humains cherchent toujours à le toucher, chaque itération du comportement accentuera sa probabilité d’apparition. Même chose avec le fait de charger ses congénères par crainte qu’ils s’approchent.
Le chien peut instrumentaliser l’agression comme seul moyen de faire partir ce qui le dérange.
Dans l’exemple du chien qui tire en laisse, Toutou apprend naturellement que tirer lui permet d’accéder à l’odeur qu’il souhaite renifler, puisqu’on le suit.
Comme le comportement est opérant (renforcé par l’obtention de quelque chose de positif pour le chien), il sera forcément reproduit.

Enfin, il est évident que, comme pour nous, une habitude est plus facile à défaire lorsqu’elle n’est pas ancrée depuis longtemps.
Une prise en charge aux premiers “symptômes” d’une problématique sera plus simple, plus rapide et moins énergivore (autant pour l’humain que son chien) qu’un travail qui commence après des années de répétitions et de renforcement du comportement.
Alors plutôt que de parier sur le fait que, peut-être, avec de la chance, le problème se résoudra seul, autant agir directement et s’économiser beaucoup d’énergie, de temps et d’argent dans une rééducation.

Le fameux “je vais éduquer mon chien moi-même et je prendrai un éducateur canin si ça ne va pas” est le point de départ de toutes les problématiques.
Mais aussi pour moi-même en tant qu’éducatrice : C’est tellement plus fun de travailler des chiots et les voir évoluer en adultes bien dans leurs pattes. Même si, au fond, j’adore travailler les chiens réactifs et voir leurs maîtres s’émerveiller de leurs progrès héhé. Ce n’est pas la même chose, c’est une stimulation différente et ceux sont les deux gros blocs du côté (ré)éducation de mon métier : Les chiots et les réactifs. Mais il est évident que pour les familles, c’est toujours plus sympa d’éduquer un chiot que de rééduquer un adulte !

Finalement, une rééducation dès l’apparition des symptômes est un bel investissement.
Voire encore mieux : Se faire accompagner dès l’arrivée de Toutou afin de le socialiser correctement, ne pas faire d’erreur et avoir les bases d’une éducation saine et bienveillante.
Tout le monde en ressortira gagnant : Vous qui aurez un chien correctement socialisé et éduqué, facile à vivre, et votre chien qui sera bien dans ses pattes.
